エピソード

  • Özgür Özel, l’apparatchik devenu homme providentiel en Turquie
    2025/04/25
    Il est devenu le visage et la voix de l’opposition à Recep Tayip Erdogan en Turquie : Özgür Özel est l’Européen de la semaine sur RFI. Cet ancien pharmacien mène le mouvement de protestation déclenché par l’arrestation du maire d'Istanbul Ekrem Imamoglu le 19 mars dernier. Özgür Özel a repris le flambeau de l’opposition au président turc. C’est lui qui harangue les dizaines de milliers de manifestants dans les rues d’Istanbul depuis plus d'un mois. Pour Özgür Özel, cette lutte dépasse les questions politiques ; c’est la démocratie qui est en jeu. « La lutte ici n'est plus une lutte entre partis politiques », expliquait-il dans une interview à l'AFP le 9 avril dernier. « La démocratie et l'autocratie s'affronteront et seront soumises au vote. Si nous gagnons, la Turquie se transformera soudainement en une démocratie où l'État de droit, la liberté de la presse, la liberté d'expression, la séparation des pouvoirs et un Parlement fort existeront. »Un inconnu devenu incontournableQuand ce député est choisi pour diriger le CHP, le Parti républicain du peuple, en novembre 2023, son nom n’évoque pas grand-chose aux Turcs. Aujourd'hui, Özgür Özel est une personnalité politique incontournable. Il a achevé sa mue dans la crise avec Recep Tayyip Erdoğan. « C'est quelqu'un qui n'a cessé finalement de s'affirmer depuis qu'il a pris la tête du parti kémaliste et depuis finalement les débuts de sa carrière politique, il a su indiscutablement faire sa place », note Jean Marcou, titulaire de la chaire Méditerranée-Moyen-Orient à Sciences Po Grenoble. « Et aujourd'hui, d'une certaine manière, c'est la configuration des faits qui confirme cette position de Özgür Özel ». La transformation d’Özgür Özel a commencé en 2014 lors de l’accident minier de Soma qui a fait plus de 300 morts, pour Ahmet Insel, un ancien professeur d’économie à l’université de Galatasaray : « À ce moment-là, il était très mobilisé et il a organisé beaucoup de mobilisations sociales. Et peut-être à ce moment-là, on l'a vu apparaître comme une figure politique. »Candidat de substitution ? Est-ce qu’il pourrait devenir le prochain candidat de l’opposition à la présidentielle ? Inimaginable il y a encore quelques mois, l’hypothèse prend forme. Özgür Özel était censé jouer le rôle du numéro 2 aux côtés d’Ekrem Imamoglu. Mais la répression du pouvoir turc rebat les cartes. L’apparatchik est-il en train de devenir l’homme providentiel ? « Un candidat aux capacités supérieures à la moyenne, mais pas excellent qui serait investi à la place d'Imamoglu, avec l'accord d'Imamoglu, a beaucoup de chance parce que du coup, les électeurs vont voter pour Imamoglu », remarque l’économiste turc Ahmet Insel. « On découvre ses capacités de tribun alors qu’Erdoğan est désormais totalement dépendant des textes qui déroulent devant ses yeux dans les discours qu'il fait. Özel arrive parfaitement à tenir pendant des longs moments sans texte. » Mais plusieurs obstacles pourraient venir compliquer ses ambitions, rappelle le chercheur Jean Marcou : « Son élection a été contestée. Les autorités turques essayent actuellement de lancer une procédure pour faire nommer des administrateurs au parti en prétendant que son élection était illégitime. Effectivement, lui aussi pourrait connaître certains problèmes de ce côté-là. »Classe moyenneDiscret sur sa vie privée, Özgür Özel a 50 ans, il vient de province, de Manisa près d’Izmir. C’est un laïc, marié, père d’une fille et il a eu un vrai métier avant la politique, pharmacien. Voix rauque, souriant, c’est aussi un fan de foot, supporter du club de Fenerbahçe. Et un profil en phase avec la société turque.« Il a une image d'une famille de classe moyenne », précise Ahmet Insel. « Ni riche ni pauvre, donc il correspond un peu à l'image qu'aime avoir un peu les classes moyennes des grandes villes qui constituent maintenant le gros des troupes des électeurs puisque la Turquie est devenue la population turque n'est plus une population rurale, c'est une population à plus de 75% urbaine ». Özgür Özel est parvenu à canaliser la colère la population turque. Son principal défi maintenant est de faire vivre le mouvement dans la durée et malgré la répression du pouvoir.
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  • Nicușor Dan, le mathématicien face à l’extrême droite en Roumanie
    2025/04/18

    Il portera l’une des voix pro-européennes à la prochaine présidentielle en Roumanie. Nicușor Dan est notre Européen de la semaine. Le maire de Bucarest est candidat aux élections des 4 et 18 mai face au favori d’extrême droite, George Simion. Nicușor Dan tente le plus gros pari politique de sa vie.

    Nicușor Dan tente sa chance dans cette élection à rebondissement. La présidentielle a été annulée au premier tour : le candidat pro-russe Călin Georgescu est soupçonné de financement illégal de sa campagne. Nicușor Dan s’est présenté en indépendant avec comme leitmotiv la justice sociale. « Je suis candidat, explique-t-il dans un clip de campagne, parce que la Roumanie est pleine d'injustices, on ne peut pas obtenir d'argent public, les impôts élevés sur le travail restent impunis, gaspillés par l'État, les enfants n'ont pas accès à l'école, les villages n'ont pas de médecins, les institutions sont faibles et les Roumains sont déçus par la classe politique actuelle. »

    Nicușor Dan a eu une autre vie avant la politique. C’est d’abord un génie des mathématiques. Il remporte la médaille d'or lors des Olympiades internationales de mathématiques en 1987 et 1988. Nicușor Dan a aussi étudié en France. Mais c’est à son retour à Bucarest dans les années 90 qu’il se lance dans l’action sociale.

    « Peu à peu, Nicușor Dan se dirige vers la défense de la vie urbaine saine en s'inspirant de plusieurs villes françaises, mais aussi en portant un projet associatif », rappelle Sergiu Miscoiu, professeur de sciences politiques à l’université de Cluj, en Roumanie. « Il fonde en 2006 l'association Sauver Bucarest qui se confronte directement avec les spéculateurs immobiliers. Il devient un peu connu en tant que militant de cette association. » Un combat qui l’amène jusqu’à l’Assemblée en 2016 puis, quatre ans plus tard, à la mairie de Bucarest. Son action contre les « mafias immobilières » de la capitale assure sa popularité.

    Candidat surprise

    À 55 ans, Nicușor Dana a vu une porte s’ouvrir devant lui. C’est au moment de l’annulation du premier tour en décembre dernier que plusieurs personnalités de l’USR, le parti libéral et europhile, lâchent leur candidate Elena Lasconi pour soutenir Nicușor Dan. Un coup de théâtre, un de plus dans cette élection. « J’ai été surpris, raconte Stelian Negrea, journaliste d’investigation à Newsweek Romania. Il venait de remporter un deuxième mandat à la mairie de Bucarest et son annonce a été une surprise pour tout le monde. »

    Un candidat surprise… et atypique. Posé, calme, dans ses costumes passe-partout, « Nicușor Dan est tout le contraire » de la classe politique traditionnelle, note le professeur Sergiu Miscoiu. « Il réfléchit peut-être un peu trop, même pour certaines réponses, mais cela crée aussi l'impression de quelqu'un qui est découplé du système politique traditionnel et donc qui a une sorte d'honnêteté dans sa manière de fonctionner. » Il se présente comme intègre, mais il a été épinglé dans la presse pour sa proximité avec un homme d’affaires pro-russe. Très discret sur sa vie privée, on sait qu’il vit avec sa compagne sans être marié, ce qui pourrait le handicaper auprès de l’électorat traditionnel dans le pays.

    Bien implanté à Bucarest, Nicușor Dan manque d’ancrage hors de la capitale. Mais ce ne sera pas un problème. « La Roumanie compte près de 9 millions de comptes TikTok », explique le journaliste Stelian Negrea. « Beaucoup d'entre eux vivent en zone rurale. Avec une campagne TikTok ciblée, on peut atteindre ces zones rurales, et cela ne devrait pas être un handicap pour lui. Chaque femme âgée de la campagne possède un compte TikTok et y est très active ! »

    Si le candidat de l’extrême-droite George Simion est donné vainqueur du premier tour, l’élection va en réalité se jouer entre deux candidats pro-européens : Nicușor Dan ou bien Crin Antonescu de la coalition au pouvoir. Celui qui passera le premier tour est quasiment assuré de l’emporter au second.

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  • Danemark: Mette Frederiksen, la «dame de fer» qui résiste aux projets expansionnistes de Donald Trump
    2025/04/04
    Elle tient tête à Donald Trump et semble prête à poursuivre le bras de fer avec le président américain sur le Groenland : Mette Frederiksen est l’Européenne de la semaine. La Première ministre du Danemark résiste face au projet de la Maison Blanche de faire main basse sur le territoire contrôlé par Copenhague. Mette Frederiksen était au Groenland cette semaine, invitée officiellement par le nouveau Premier ministre groenlandais. Visite symbolique et politique forte avec un message clair à faire passer. « Les États-Unis ne doivent pas s'emparer du Groenland. Le Groenland appartient aux Groenlandais »,a-t-elle déclaré.Popularité en hausseSa fermeté face à Donald Trump est saluée dans le pays. Sa résistance lui donne un coup de boost dans les sondages. « Elle est bien plus populaire auprès des électeurs danois qu'elle ne l'était auparavant, explique Elisabet Svane, éditorialiste politique au grand journal danois Politiken. Son gouvernement a été très impopulaire, car les gens ne comprenaient pas pourquoi les libéraux de droite et la gauche pouvaient collaborer. Ces partis, habituellement éloignés les uns des autres, sont généralement des adversaires politiques. » Une fermeté que les Danois ont déjà vue : pendant la crise du Covid, elle avait marqué les esprits. Mette Frederiksen n’avait pas hésité à ordonner l’abattage de tous les visons du pays. Avant de s’excuser, en larmes, devant les caméras.À lire aussiGroenland: les déclarations de Trump créent la stupeur, le Danemark se dit «ouvert au dialogue»« Dame de fer scandinave »Mette Frederiksen est surnommée la « dame de fer scandinave ». Dès son arrivée au pouvoir, elle mène une politique anti-migrants. Pourtant, elle était autrefois appelée « Mette la rouge ». Ses passages aux ministères de l’Emploi et de la Justice l’ont changé. Mais ce virage idéologique est aussi stratégique : Mette Frederiksen a voulu contrer l'essor des nationalistes du Parti du peuple danois. « Si les sociaux-démocrates voulaient conserver leur position de premier parti au Danemark, elle a décidé qu'il fallait combler l'écart entre eux, raconte Niels Dahl, il analyse la politique danoise au quotidien Jyllands-Posten. Donc, sur le plan politique, elle a fortement orienté son parti vers la droite, avec une politique très stricte en matière d'immigration. Et en même temps, elle a orienté sa politique économique un peu plus à gauche, ce qui a été un facteur clé de sa victoire électorale en 2019. »Politique précoce Mette Frederiksen s’est engagée en politique très jeune. À 15 ans à peine, elle rejoint le Parti social-démocrate. Une ascension express : à 24 ans, elle est élue au Parlement. À 41 ans, elle devient la plus jeune Première ministre du pays. Avec un style parfois autoritaire. « Elle aime obtenir ce qu'elle veut ! Et elle n'a pas peur de faire pression, surtout au sein de son parti, explique le professeur Rune Stubager. Elle veut que les députés suivent la ligne du parti et s'y tiennent. On l'accuse de concentrer trop de pouvoir autour d'elle, tant au sein du parti qu'au sein du gouvernement. » Pour le journaliste Niels Dahl, la force de Mette Frederiksen, c’est justement d'aimer le pouvoir : « Elle aime l'avoir et elle aime l'exercer. Elle n'a jamais hésité à user de son pouvoir si elle en avait l'occasion pour faire ce qu'elle jugeait nécessaire. Et je pense que c'est en quelque sorte sa plus grande qualité : sa capacité à accomplir des choses, sa volonté de le faire quand elle le juge nécessaire. »Cuisine traditionnelle et maison à la campagneDiscrète sur sa vie privée, Mette Frederiksen est mère de deux enfants et s'est remariée avec un réalisateur de cinéma. Elle aime cuisiner des plats traditionnels danois et le fait savoir sur Instagram. Elle a acheté une ferme à la campagne dans laquelle l’attend sa vie d’après la politique.Candidate à sa succession ? À 47 ans, elle a encore du temps devant elle. Cela fait plus de cinq ans qu’elle est au pouvoir et Mette Frederiksen devrait rester au pouvoir. Les prochaines élections sont prévues en novembre. Elle a de fortes chances de remporter un troisième mandat avec peut-être une nouvelle coalition. La suite pourrait aussi l’amener à un gros poste à la tête de l’Union européenne ou bien à l’Otan. À lire aussiCes alliés des États-Unis qui commencent à dire «non» à Donald Trump
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  • Aleksandar Vucic, le président serbe face à une contestation sans précédent
    2025/03/14
    La Serbie retient son souffle à la veille d’une manifestation contre la corruption qui s’annonce massive. À l’appel des étudiants serbes qui se mobilisent depuis novembre dernier, des centaines de milliers de personnes sont attendues à Belgrade ce samedi 15 mars, avec le risque d’un embrasement entre partisans et adversaires du président serbe. C’est un mouvement de contestation massif qui s’est emparé de la Serbie depuis plusieurs mois, avec comme point de départ l’incident tragique de la gare de Novi Sad le 1er novembre dernier. L’effondrement de l’auvent de la gare, qui venait tout juste d’être rénové, a fait 15 morts et suscite une émotion et une indignation majeure en Serbie. « Cet incident meurtrier est un catalyseur extrêmement fort parce qu’il concentre tout ce que le régime commet en termes de violations de l'État de droit, en termes de pratiques clientélaires, en termes de corruption endémique », pointe Sophie Gueudet, chercheuse à l’École supérieure Sant’Anna de Pise et spécialiste des Balkans. Ce sont les étudiants serbes qui vont prendre la tête de cette contestation avec un blocage des universités et des manifestations de plus en plus massives.Une mobilisation qu’Aleksandar Vucic ne parvient pas à endiguer malgré les concessions accordées au fil des mois : l’inculpation d’une douzaine de responsables, la démission du Premier ministre et la publication d’une partie des contrats passés avec l’entreprise chinoise chargée des travaux. D’un côté, Aleksandar Vucic tente d'apaiser la colère et de l’autre, il essaie de décrédibiliser la contestation. « C'est vraiment un registre de l'exercice du pouvoir par le régime Vucic : essayer de tourner en dérision les contestataires en les faisant apparaître comme des fauteurs de trouble, qu’il s’agisse de manifestants écologistes comme par le passé, ou des étudiants dans le cas présent », décrypte Sophie Gueudet. « Vous avez aussi l'emprunt par le régime d’Alexander Vucic de toute une rhétorique empruntée à la Russie de Vladimir Poutine : qualifier ces mouvements de "révolution de couleur", qualifier les manifestants "d'agents de l’étranger" de sorte à disqualifier la légitimité de leurs revendications. »À lire aussiSerbie: à Belgrade, qui se prépare à accueillir une manifestation d'envergure, la tension monte Rallier les zones ruralesAleksandar Vucic est au pouvoir depuis 2014 en tant que Premier ministre puis en tant que président et il a affronté déjà plusieurs mouvements de contestation, mais jamais de cette ampleur. Avec une difficulté de taille : les étudiants serbes ont pris le soin d’aller mobiliser dans les zones rurales traditionnellement proches du président serbe en organisant des marches de plusieurs centaines de kilomètres en amont des manifestations. « Le fait d'aller chercher les campagnes, c'est vraiment l’idée de mobiliser l'ensemble de la société », souligne Pauline Soulier, chercheuse associée à l’Institut de Recherche Montesquieu à l’Université de Bordeaux. « Et dans les campagnes, il y a quand même un ralliement plus fort à Aleksandar Vucic… Pour l'instant, cela fonctionne : les étudiants sont très bien accueillis dans les petites et moyennes villes. Les gens leur apportent leur soutien, de la nourriture et des médicaments. »Une Église orthodoxe diviséeFace à cette contestation sans précédent, Aleksandar Vucic conserve cependant des atouts importants. Aujourd’hui âgé de 55 ans, le président serbe a été ministre de Slobodan Milosevic et a commencé sa carrière au sein de la mouvance ultra-nationaliste. Admirateur déclaré de Vladimir Poutine, il exerce un contrôle étroit sur l’appareil d’État et sur les médias. Il a également le soutien de l’Église orthodoxe serbe. Pour le moment en tout cas, car cette Église qui peut jouer un rôle politique crucial en Serbie est divisée face à la contestation. « Les étudiants en théologie ont d’abord rejoint le mouvement, mais ils ont rapidement été sommés de se retirer », observe Pauline Soulier. « Néanmoins, le bas-clergé est plutôt favorable au mouvement étudiant, tandis que le haut-clergé soutien le président serbe, et notamment le patriarche qui est proche idéologiquement de Vucic. Il y a donc vraiment un tiraillement au sein de l'Église entre les partisans de Vucic et les partisans des manifestants. »La mobilisation qui aura lieu demain s’annonce en tout cas décisive – car les étudiants veulent en faire le point d’orgue de leur mobilisation. De son côté, Aleksandar Vucic a demandé à ses partisans de se mobiliser également dans les rues de Belgrade, accusant ses opposants de vouloir provoquer des violences. Pas question pour le président serbe de renoncer au pouvoir et d'envisager, comme le demande l'opposition, la formation d'un gouvernement de transition. À ...
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  • Christian Stocker, un «quasi-inconnu» à la tête de l’Autriche
    2025/03/07
    L’Autriche a un nouveau chancelier et un gouvernement en ordre de marche depuis cette semaine et c’est la fin d’une crise politique sans précédent pour le petit pays alpin. Après cinq mois de négociations et de blocage, c'est un député quasiment inconnu du grand public qui a été désigné chancelier. Christian Stocker aura la rude tâche de conduire la coalition tripartite formée par les conservateurs, les socialistes et les libéraux. Avec une ambition : tenir à l'écart du pouvoir une extrême droite autrichienne en pleine ascension. Tout commence par les élections législatives de septembre en Autriche et le résultat historique du parti FPÖ (extrême-droite) qui arrive en première position avec 29% des voix. Pour lui barrer la route, les conservateurs de l’ÖVP tentent de monter une coalition avec les socialistes et les libéraux… sans y parvenir. Au bout de quatre mois de tractations, et en désespoir de cause, les conservateurs se tournent vers Christian Stocker qui est alors le secrétaire général de l’ÖVP. Cet ancien avocat de 64 ans est un homme politique discret dont très peu de monde avait jusqu’alors entendu parler.« Il a commencé sa carrière au niveau national assez tard puisqu'il a été élu député pour la première fois en 2019 », rappelle Andreas Eisl, chercheur à l’Institut Jacques Delors. « Avant cela, il a fait une carrière d’avocat, avec parallèlement un travail politique essentiellement au niveau local. » Maire adjoint de Wiener Neustadt, petite ville autrichienne d’environ 40 000 habitants, Christian Stocker n’a aucune expérience gouvernementale, et ne brille ni par son charisme ni par ses talents d’orateur. Sa seule particularité est d’apprécier la pêche à la ligne et le saxophone. « Si on le compare avec des personnages comme le conservateur Sebastian Kurz qui a été chancelier de 2017 à 2021, il n'a pas vraiment l'air d'être charismatique », pointe Andreas Eisl. « Je pense qu’au début ce n’était pas vraiment prévu qu’il devienne chancelier. » Chancelier « par défaut »Lui-même a été le premier surpris de se retrouver dans cette position. Christian Stocker raconte d’ailleurs qu’en janvier, lorsqu’il apprend qu’il va diriger les négociations pour tenter de devenir chancelier, il est à Vienne en jeans et en pull-over et qu’il doit donc demander en catastrophe à ce qu’on lui apporte un costume et une cravate ! L’ancien avocat est un candidat par défaut, « un pis-aller » peut-on lire dans la presse autrichienne. Dans un premier temps, il surprend et suscite même l’indignation en tentant de négocier avec l’extrême droite. Ces pourparlers n’aboutissent pas, mais il parvient ensuite à mettre d’accord les socialistes et les libéraux et réussit là où le chancelier sortant, Karl Nehammer, avait lamentablement échoué. Ses talents de négociateur et son sens du compromis ont sans doute joué un rôle, mais Christian Stocker a aussi largement bénéficié du contexte et notamment du contexte international. « D'abord, il n'était pas possible qu'il échoue à nouveau », décrypte Jérôme Segal, enseignant et chercheur franco-autrichien. « Le pays était en crise depuis 154 jours. Il n'y avait pas de gouvernement, c’était simplement une gestion des affaires courantes. Et les événements internationaux avec les premières décisions de Trump et la guerre en Ukraine rendaient vraiment nécessaire qu'un gouvernement soit nommé. »À lire aussiAutriche: trois partis annoncent un gouvernement pro-européen et sans l'extrême droiteL’extrême droite en embuscadeChristian Stocker parvient donc à un compromis avec les socialistes et les libéraux du parti Neos, chacun obtenant des concessions permettant de passer outre leurs divergences initiales. Les conservateurs engrangent des mesures fortes sur l’immigration – avec la suspension du regroupement familial, les socialistes obtiennent le plafonnement des loyers, et les libéraux une augmentation des cotisations de retraite. L’enjeu pour le nouveau chancelier sera de maintenir en vie ce « mariage à trois », cette coalition tripartite qui n’a jamais eu de précédent en Autriche. « Cette coalition va bénéficier forcément d'un état de grâce pendant les quelques semaines ou mois à venir et je pense que les Autrichiens vont vouloir juger sur pièce », estime Jérôme Segal. « Mais en embuscade se trouve déjà le FPÖ : ils ont obtenu 29% en septembre et les sondages actuels montrent qu'ils continuent de monter et qu’ils sont déjà au-dessus de 30%. Donc, il n'y aura aucun cadeau fait par l'extrême droite face à ce gouvernement de coalition. »L’extrême droite autrichienne réclame déjà, d’ailleurs, des élections anticipées, dénonce un « gouvernement de perdants » et se dit prête à revenir aux urnes dès que possible. Le FPÖ parie pour cela sur les questions budgétaires, défi ...
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  • Les attaques trumpistes, énième défi pour le président Zelensky
    2025/02/21
    À quelques jours du troisième anniversaire de l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie, Volodymyr Zelensky voit son principal allié le traiter de « dictateur sans élection », et assiste impuissant à la reprise de contact entre Washington et Moscou. Une débâcle diplomatique pour le président ukrainien qui voit s’effondrer les unes après les autres toutes les lignes rouges qu’il avait fixées sous l’administration Biden. Volodymyr Zelensky aura tout fait pour amadouer Donald Trump depuis qu’il a remporté l’élection présidentielle afin d'éviter un lâchage américain et le scénario auquel on assiste actuellement. Multipliant les déclarations flatteuses pour le président américain, promettant un accès privilégié des États-Unis aux terres rares ukrainiennes… L’offensive de charme n’a pas fonctionné et s’est même soldée par un fiasco absolu. En quelques jours, le président ukrainien a assisté impuissant au franchissement, par son meilleur allié, de toutes les lignes rouges qu’il avait fixées et que soutenait la précédente administration américaine. Washington exclut l’adhésion de l’Ukraine à l’Otan sans lui apporter de garanties de sécurité, qualifiant « d’illusoire » la possibilité pour l’Ukraine de revenir à ses frontières de 1991. En outre, les États-Unis acceptent de parler à Moscou sans convier l’Ukraine à la table des négociations.Un coup de massue pour les Ukrainiens et pour leur président. « Volodymyr Zelensky est tout simplement sous le choc de ce qui est en train de se passer, souffle la journaliste Alya Shandra, rédactrice en chef du site Euromaidan Press. C’est une véritable douche froide. Nous savions que Trump pouvait être néfaste pour l’Ukraine, mais personne n’imaginait que cela irait aussi vite. Son administration a une approche prédatrice vis-à-vis de l’Ukraine et de ses ressources, et je pense qu’il n’y a rien que Zelensky puisse faire actuellement pour changer la situation. »Un président marqué par la guerreUn Volodymyr Zelensky impuissant face au dirigeant américain et qui accuse le coup après trois années de guerre menée par la Russie. L’évolution physique du président ukrainien depuis bientôt quatre ans en dit long sur la fatigue éprouvée par le président ukrainien. Sur les images, le contraste est frappant entre le comédien souriant, élu en 2019 à l’âge de 41 ans, et le président de guerre qu’il est devenu.« L'absence de sommeil, les mauvaises nouvelles qui s'accumulent, le niveau d'inquiétude et d'angoisse qui peut être celui d'un président qui a refusé de fuir Kiev dans les premiers jours de guerre, tout cela a dû peser très lourd sur ses épaules, note Florent Parmentier, spécialiste de l’Europe de l’Est et secrétaire général du Cevipof. Incontestablement, c'est un homme qui a dû faire des choix terribles et qu'on ne souhaiterait à personne d'avoir à faire. Il est aujourd’hui dans une situation où il est lâché par ses partenaires internationaux et où il fait, en outre, l’objet de critiques sur le plan intérieur. »Décisions contestéesCar ce président, usé par la guerre et lâché par son principal allié, traverse également une phase difficile sur la scène intérieure. Certaines de ses décisions ont fait l’objet de critiques acerbes. Notamment le limogeage de Valery Zalounjy, le très populaire chef des armées, nommé ambassadeur au Royaume-Uni, ainsi que sa propension à de concentrer les pouvoirs au sein de son cabinet. De même, les sanctions prises contre Petro Porochenko ont suscité de nombreuses réserves au sein de la classe politique ukrainienne et de la société civile. Président ukrainien de 2014 à 2019, l’homme d’affaires s’est vu interdit de quitter le territoire ou d’apparaître à la télévision, ce qui a été interprété comme une forme de punition politique de la part de son successeur.« Avant l’invasion à grande échelle en 2022, l’administration Zelensky avait déjà lancé des poursuites contre Porochenko, mais avec la guerre, il y a eu une sorte de trêve parce qu’il fallait rester unis face à l’agresseur, décrypte la journaliste Alya Shandra. Puis il y a eu ces sanctions qui ont mis fin à cette trêve. Certains y voient une façon de préparer d’éventuelles élections, mais c’est étrange, car Porochenko est très bas dans les sondages. Cela ressemble plutôt à la continuation d’une vendetta personnelle contre lui. »L’offensive verbale de TrumpPour la Russie de Vladimir Poutine, l’impopularité supposée de Volodymyr Zelensky et le report sine die des élections rendent illégitimes le président ukrainien. Des accusations infondées dans la mesure où l’Ukraine ne peut organiser de scrutin tant que la guerre se poursuit, et que son territoire est partiellement occupé. Mais qui sont pourtant reprises telles quelles par Donald Trump,...
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  • Allemagne: clap de fin pour Olaf Scholz?
    2025/02/14
    Dimanche 23 février, les électeurs allemands voteront dans le cadre des élections fédérales anticipées suite à l’éclatement de la coalition « feu tricolore » emmenée par Olaf Scholz. Un scrutin qui pourrait bien rester dans les annales de la politique allemande, car si l’on en croit les sondages, l’AfD, l’Alternative pour l’Allemagne, formation d’extrême droite, pourrait devenir la deuxième force politique du pays. Un changement brutal après la chute du gouvernement d’Olaf Scholz, tête de liste du parti social-démocrate pour ces élections, pris de cours durant son mandat par un contexte géopolitique aux multiples impacts pour un pays qui voit ses certitudes s’effondrer les unes après les autres. Ces élections pourraient bien marquer la fin de la carrière politique d’Olaf Scholz. À soixante-six ans, le chancelier sortant, ancien ministre des Finances dans le dernier gouvernement d’Angela Merkel, qui fut également maire de Hambourg entre 2011 et 2019, pourrait bien tirer sa révérence si sa formation, le SPD, le Parti social-démocrate, subit une défaite historique, ce que prédisent les sondages.Une coalition vouée à l’échecIl faut dire que la coalition « feu tricolore » qu’il dirigeait, avec le Parti social-démocrate, les Verts et le Parti libéral-démocrate, était plus ou moins vouée à l’échec, surtout dans un contexte de crises énergétique, économique et géopolitique. ​​​​​​ « C'était une coalition un peu contre-nature, estime Étienne Dubslaff, docteur en civilisation allemande et en histoire contemporaine et maître de conférences à l'Université Paris Nanterre. Il y a bien certains points communs, notamment dans la politique sociétale — ce sont trois partis plutôt libéraux somme toute, ils sont favorables par exemple au mariage gay ou encore plus ou moins favorables à la légalisation du cannabis. C'est anecdotique, mais néanmoins, ça joue quand même un rôle. Donc, là-dessus, ces trois partis pouvaient tout à fait s'entendre. En revanche, il y a toujours eu de graves dissensions, notamment entre les Verts et les Libéraux, autour des questions économique et financière. »Le déficit public : un verrou qui a eu raison de la coalitionEt ce sont justement ces questions d’ordre économique et financière qui ont fait imploser la coalition. Les sociaux-démocrates et les Verts souhaitaient faire sauter le verrou de la dette publique, un thème tabou en Allemagne. Mais mettre fin à ce verrou était indispensable, selon Olaf Scholz, pour relancer l’économie allemande, qui pourrait connaître une troisième année de récession en 2025, ce qui serait une première.Mais son ministre des Finances, également chef du FDP, le parti libéral, était totalement opposé à cette idée contraire aux principes de son parti. Et c’est ce point de crispation qui a fait éclater en novembre dernier la coalition « feu tricolore ». Une situation dont n’est pas vraiment responsable Olaf Scholz, détaille Marie Krpata, chercheuse au Cerfa, le Comité d'études des relations franco-allemandes à l'Ifri : « Avant lui, Angela Merkel a été au pouvoir pendant seize ans. Et un certain nombre de décisions ont été prises qui finalement ont fragilisé l'Allemagne. Et cela ne date pas d’Olaf Scholz en tant que chancelier, puisqu'en effet, la dépendance par rapport à la Russie sur le plan énergétique, c'était bien avant Olaf Scholz. Sous Angela Merkel aussi, il y a eu un sous-investissement dans l'armée allemande et aujourd'hui, on se rend compte de l'impact négatif que cela peut avoir. Alors effectivement, les sociaux-démocrates ont aussi été au gouvernement sous Angela Merkel, mais il est un peu trop simple de dire que la faute finalement est celle d’Olaf Scholz. »À écouter dans DécryptageÉconomie, politique: la fin du modèle allemand?Olaf Scholz : un candidat hors sujet ?Fini donc la coalition « feu tricolore », et pourtant, Olaf Scholz décide malgré tout de prendre la tête de la liste du SPD pour les prochaines élections. Mais le problème, c'est que les thèmes qui lui sont chers ne sont pas les thèmes qui dominent la campagne électorale. L’Allemagne a besoin de relancer son économie, d’investir dans des secteurs clés selon lui, mais ce sont d’autres questions qui dominent les débats, comme l’explique Marie Krpata : « Le thème de l'immigration est aujourd'hui un des thèmes phares de cette campagne électorale, qui plus est après un certain nombre d'attaques au couteau et différents attentats qu'il y a pu y avoir précédemment. Ce sujet de l'immigration et ce sujet de la sécurité aujourd'hui domine cette campagne électorale, même si, évidemment, la question de l'économie, de la compétitivité joue un rôle, mais aussi l'ingérence étrangère, avec Elon Musk qui soutient l'AfD effectivement. » Alors, bien que donné vainqueur après le ...
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  • Législatives allemandes: la stratégie périlleuse du favori des sondages Friedrich Merz
    2025/02/07
    L’Allemagne est polarisée alors que la campagne des législatives anticipées entre dans sa phase finale. Le favori des sondages, le patron de la CDU/CSU, Friedrich Merz, fait face à un front de contestation, y compris au sein de son propre parti, depuis qu’il a tenté, à deux reprises, de faire adopter des mesures sur l’immigration avec les voix de l’AfD. En décidant de s’appuyer par deux fois sur l’extrême droite pour tenter de faire passer au Bundestag des textes contre l’immigration, Friedrich Merz a brisé un tabou et provoqué un séisme politique. Ses propositions de contrôles permanents aux frontières et de refoulement des demandeurs d’asile « sans-papiers » n’ont été adoptées qu’avec les voix de l’AfD. Jusque-là, aucun parti n’avait encore rompu le « cordon sanitaire » autour de l’extrême droite allemande.Dans un entretien à Ouest-France, le patron de la CDU répète qu’il exclut « toute coalition, tout arrangement, toute forme de coopération avec l’AfD ». Cela sera-t-il suffisant pour rassurer les électeurs modérés du parti ? « Il est très clair que la CDU et ses électeurs ne pourraient pas accepter une véritable alliance avec l’AfD, sous peine d’éclatement du parti. M. Merz le sait et il ne prendra pas ce risque », commente Éric-André Martin, spécialiste de l’Allemagne, ancien directeur de programme à l’Ifri. Mais en choisissant de mettre l’accent sur l’immigration et en faisant voter sa motion grâce aux voix de députés d’extrême droite, il a suscité des réactions hostiles dans l’opinion et provoqué des manifestations importantes dans le pays. « Il polarise et il rendra les choses plus difficiles pour lui s’il ressortait victorieux des élections », souligne Éric-André Martin. En dépit de ce faux pas, dont les conséquences pourront se mesurer le 23 février, Friedrich Merz et son Union chrétienne démocrate restent les favoris des sondages. Friedrich Merz conserve ses chances de prendre la place d’Olaf Scholz à la Chancellerie. Si la CDU/CSU continue de mener la course en tête, le durcissement du ton sur l’immigration, dans la foulée de l’attaque au couteau perpétrée le 22 janvier par un jeune Afghan à Aschaffenbourg, en Bavière, provoque de vives réactions. En faisant adopter une motion non contraignante sur l’immigration avec l’aide de l’extrême droite, puis en échouant à faire voter une proposition de loi visant à refouler tous les migrants à la frontière et à restreindre le regroupement familial, il semble avoir perdu des points. De 34-35 % d’intentions de vote, la CDU passe aujourd’hui à 29-30 %. À lire aussiAllemagne: mobilisation massive contre l'alliance entre la droite et l'extrême droiteCDU toujours en têteLe candidat des Verts à la chancellerie, le ministre de l’Économie Robert Habeck, cité par Deutschlandfunk, a déclaré qu’il ne pouvait pas imaginer que les événements de la semaine dernière « n’aient aucune influence sur la décision de vote des Allemands ». Face aux critiques et mouvements de protestation, lors du Congrès de la CDU lundi 3 février, Friedrich Merz a continué de se justifier : « La grande majorité de la population est d’accord avec nous que les choses ne peuvent pas continuer ainsi, par exemple, en matière de politique migratoire. La minorité sociale et politique, de plus en plus petite en Allemagne, se bat actuellement désespérément pour conserver son pouvoir de décision dans notre pays ». Ses prises de position divisent pourtant jusqu’au sein même de la CDU. À cette occasion, sa vieille rivalité avec Angela Merkel a refait surface. L’ancienne chancelière est sortie de sa réserve pour dénoncer le tournant pris par la droite allemande. « Il n’a pas pu éviter la confrontation avec les Merkeliens », souligne le politologue allemand Werner Patzelt, membre de la CDU, qui estime que les « chances de Friedrich Merz de sortir vainqueur de ce conflit » sont grandes.Douze députés chrétiens-démocrates ont pourtant refusé de voter une proposition de loi de la CDU aux côtés de l’AfD vendredi 31 janvier, faisant échouer d’adoption du texte. « Il a toujours critiqué la politique d’immigration d’Angela Merkel de même que sa politique sociale. Il a promis aux membres de la CDU de changer ce programme politique et c’est exactement ce qu’il a fait la semaine passée », avance le politologue, considéré comme un influenceur de la nouvelle droite, professeur de sciences politiques au Mathias Corvinus Collegium à Bruxelles, un établissement financé par l’État hongrois.Le rapprochement de circonstance du député de Rhénanie-du-Nord-Westphalie avec l’AfD risque de compliquer les choses, bien au-delà des tiraillements entre les divers courants du parti. Friedrich Merz doit s’attendre à ce que la constitution de coalitions soit délicate. Après ...
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