エピソード

  • Les plumes de la Révolution : archives littéraires de la Guinée de Sékou Touré
    2025/10/31

    En 1958, Sékou Touré s’oppose au général De Gaulle. L’ancien syndicaliste mène la fronde anticoloniale et son pays, la Guinée, embrasse la liberté. Les Français partent. Il devient un héros national et continental, le pays attire les convoitises, on s’y presse pour participer à l’élan. Mais au pouvoir Ahmed Sékou Touré changera, vite, de héros à tyran. Sous son règne, un trésor pour les chercheurs, les archives de la Révolution : textes, littératures d’Etat, journaux… Il faut éduquer le peuple.

    Avec la participation de Elara Bertho, agrégée en lettres modernes, chargée de recherches au CNRS, au sein du laboratoire Les Afriques dans le monde, autrice de « Conakry. Une utopie panafricaine - Récits et contre-récits 1958-1984 » (éd. CNRS)

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    Elgas : Avant la révolution, les écrits sont là pour dire le désir de libération. La presse et les revues sont l'épicentre du bouillonnement intellectuel où les aspirants écrivains, journalistes, activistes font leurs classes. L'écrit est une arme anticoloniale et il sera décisif dans la marche pour l'indépendance, même si toute la production reste liée à l'Empire. C'est dans ce contexte que vous nous replongez, vous ressortez des tiroirs poussiéreux des trésors de cette période. Qu'est-ce qui explique ce foisonnement d'écrits et pourriez-vous nous faire la cartographie de ces années 50 ?

    Elara Bertho : Je repars des années qui précèdent l'indépendance, on a tous en tête que Ahmed Sékou Touré aurait été un homme seul. En réalité, il fait partie d'une constellation de journalistes ou de jeunes qui commencent à prendre la plume à l'intérieur de la presse coloniale publiée en Guinée. Et ils revendiquent les mêmes droits et les mêmes devoirs dans une possibilité d'une union française. En réalité, ils ne demandent pas tout de suite l'indépendance. Ils commencent à demander les mêmes droits et les mêmes devoirs dans ce qui pourrait être appelé une logique d'assimilation. Et l'un d'entre eux, par exemple, Mamadou Traoré, qui prendra que le nom de plume de Ray Autra, a une plume absolument délicieuse. En faisant des jeux de mots, en dénonçant comment la colonisation au quotidien dysfonctionne. Ces petites pépites satiristes vont parsemer la presse coloniale. Et plus tard, il va demander beaucoup plus frontalement que la France soit mise face à ses responsabilités, c'est-à-dire qu'elle assume ce discours civilisationnel qu'elle promet par ailleurs.

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    39 分
  • L’uranium du Congo et la naissance de l’ère atomique
    2025/10/24

    La mémoire du continent vous plonge au cœur de la Seconde Guerre mondiale dont l’apogée sera le largage de deux bombes atomiques sur les villes japonaises de Hiroshima et Nagasaki. Ce que l’on sait moins, c’est que pour fabriquer ces bombes, l’Afrique sera mise à contribution, puisque l’uranium nécessaire à leur production sera extrait de la mine de Shinkolobwe, au Katanga, en République démocratique du Congo. Retour sur la rencontre entre l’histoire de l’atome et l’histoire coloniale.

    Avec la participation de l’écrivain congolais Blaise Ndala, auteur de « L’équation avant la nuit » (éd. Lattès).

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    Elgas : On voit qu'il existe des sites un peu partout dans le monde. Mais ce qui fait l'unicité de l'uranium du Katanga, c'est sa qualité...

    Blaise Ndala : Oui c'est sa grande qualité. Les États-Unis ne sont pas dépourvus totalement d'uranium. Ils en ont, mais en qualité pauvre. Einstein le mentionne d'ailleurs dans une lettre. Il dit que le meilleur uranium, «c'est celui que vous trouverez au Katanga». Donc à partir de là, les Américains se rendent compte qu'il va falloir se rattraper et donc ils recherchent le patron de l'Union minière pour prendre langue avec lui. Et après, ils comprennent qu'en fait, s'ils veulent mener un projet aussi gigantesque que celui-là et rattraper les douze mois de retard qui les séparent du programme que mène Heisenberg, il faut qu'ils aillent à la source, donc qu'ils fassent le déplacement vers le Katanga et qu'ils exploitent directement la mine et fassent revenir ce qu'il faut en tirer aux États-Unis.

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    39 分
  • Entre oubli et mémoire, l’enseignement du passé colonial en France
    2025/10/17

    La mémoire du continent a pris ses quartiers à Blois à l’occasion de la 28ème édition des Rendez-vous de l’histoire, pour tenter de comprendre comment est enseigné le fait colonial en France à l’heure d’une forte exigence d’inclusion. Quelle est la place de l’école dans les sujets post-coloniaux ? Comment s’incarne le récit de glorification colonial dès la IIIème République ? Quels programmes scolaires aujourd’hui ?

    Avec la participation de Laurence De Cock, historienne, chargée de cours en didactique de l’histoire et sociologie du curriculum à l’Université de Paris, spécialiste de l’histoire de l’éducation et de l’école

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  • La colonisation en débat : faut-il s’excuser et réparer ?
    2025/10/10

    Doit-on s’excuser de la colonisation ? De l’esclavage aux décolonisations, des guerres et crimes coloniaux, de l’expropriation et des dominations multiformes aux survivances de cet écosystème colonial aujourd’hui, comment créer un horizon commun pour apaiser les mémoires ? Les puissances coloniales sont-elles prêtes, enclines à présenter leurs excuses ? A des réparations financières ? Que demandent les ex-colonisés ? Quel état des lieux dans la reconnaissance de la colonisation aujourd’hui ?

    Avec la participation de :

    Pascal Blanchard, historien spécialiste du fait colonial et de l’histoire des immigrations, co-auteur de « Doit-on s’excuser de la colonisation ? » (éd. Desclée de Brouwer)

    Chikouna Cissé, historien de la migration, maître de conférences en Histoire de l'Afrique à l'Université Félix Houphouët Boigny d'Abidjan

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    Elgas : Pourquoi les pouvoirs successifs semblent tétanisés à l'idée de rétablir la vérité ?

    Pascal Blanchard : Parce que la vérité fait peur. Dire que la République a colonisé, a dominé, à tuer, a réprimé, a empêché la liberté, a empêché l'autre d'être son égal, et a fabriqué par le droit de la distinction en fonction d'une couleur de peau, a autorisé le pillage, le viol et la domination... Par définition, personne n'a envie de l'entendre. Personne n'a envie d'entendre que son histoire a été maculée de sang. Personne n'a envie d'entendre qu'ils ont été du mauvais côté de l'histoire. Personne n'a envie de dire que la France, pour être "grande", a dû réduire les autres à n'être rien. Personne n'a envie d'entendre ce récit là. On a envie d'entendre que cet empire colonial sur lequel le soleil ne se couchait jamais, c'était la grandeur. Et c'était le moment où la France était à son apogée. C'est ça que les gens ont envie d'entendre.

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    39 分
  • Massacre du 28 septembre à Conakry, une tragédie guinéenne
    2025/10/03

    La mémoire du continent vous raconte le tragique massacre du 28 septembre 2009 à Conakry, en Guinée. 156 morts, des centaines de femmes violées, un millier de blessés. A la tête de l’Etat, un jeune capitaine qui s’est invité au pouvoir quelques mois plus tôt, Moussa Dadis Camara. Quinze ans après la tragédie, un procès s’est tenu. Près de deux ans d’audience, temps fort de la mémoire et du devoir de justice. Un verdict historique, avant un goût d’inachevé.

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    39 分
  • Cinéma: le Fespaco, la longévité d’une vitrine du continent
    2025/09/26

    Direction le Burkina Faso où, en pleine période d’effervescence post-indépendances, le monde de l’art se rebiffe et le cinéma se fraie un chemin. En 1969, un petit noyau de cinéphiles, organisés en cinéclub, bientôt rejoints par des acteurs culturels décidés et des cinéastes, font naître l’idée d’une semaine du cinéma africain. Semaine qui deviendra dès 1972 le Festival panafricain du cinéma de Ouagadougou, le FESPACO.

    Avec notre invité Aboubacar Demba Cissokho, journaliste et critique de cinéma, auteur de « Fespaco : Par-delà les écrans » (éd. Baobab).

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    Elgas : Vous mentionnez Thomas Sankara dans votre livre. Il y a une très belle place. On sent d'ailleurs votre admiration pour son legs et sa vision, au moins pour la question des arts. Que représente-t-il pour ce festival ?

    Aboubacar Demba Cissokho : Il représente beaucoup de choses. Il a installé dans la conscience des Burkinabé, puis des amateurs et des professionnels du cinéma, l'idée que leur travail artistique est important dans l'entreprise globale qu'est la promotion de la culture. Et cette conscience est toujours là malgré les vicissitudes, les soubresauts sociopolitiques, les difficultés économiques, cette conscience que l'art et la culture sont importants dans la représentation, l'image que se donne un peuple, l'image qu'il se donne à lui-même et l'image qu'il donne à l'extérieur. Et ce que Sankara a ajouté aussi, c'est la dimension panafricaine. C'était inscrit, mais Sankara lui a donné corps. En 1984, il est allé à l'Assemblée générale des Nations unies. Il lui a prononcé un discours et en marge de cette assemblée générale, il est allé à Harlem. Il a rencontré la communauté africaine américaine. À l'époque, on ne disait plus afro-américaine. Et il a pris conscience qu'il fallait intégrer la diaspora, lui donner une place au Fespaco. D'où la création du prix Paul Robeson, prix de la diaspora qui récompense les cinéastes en 1985. Et ce prix existe toujours. Un troisième élément, c'est la proximité que Sankara a créée entre les élites et le public. Lui-même se déplaçait, rencontrait les cinéastes, les artistes, les recevait, invitait ses amis. Et donc ces trois dimensions-là ont fait que sa place est toujours évoquée quand on parle de l'histoire du Fespaco.

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    39 分
  • Al-Hajj Musa ibn Hissein, le savant méconnu du Borno
    2025/09/19

    Les courants du monde nous mènent ce dimanche entre la fin du XIXème et le début du XXème siècle sur les traces d’un savant, d’un lettré, d’un voyageur en perpétuelle quête de savoirs. Il s’appelle al-Hajj Musa ibn Hissein, et on le suit de Bursari, terre de sa naissance, à Zinder, Benghazi, Jérusalem ou encore au Caire. En Égypte, il fera la rencontre d’un linguiste allemand, Rudolf Prietze, auquel il confie sous formes orales et écrites un impressionnant corpus en kanouri et en haoussa.

    Avec la participation de :

    - Camille Lefebvre, historienne, directrice de recherche au CNRS (Centre national de la recherche scientifique) et à l’EHESS (École des Hautes Études en Sciences sociales)

    - Ari Awagana, linguiste, maître de conférences en Langues et Linguistiques africaines à l’Université de Leipzig

    Auteurs de «L'œuvre en kanouri d’al-Hajj Musa ibn Hissein, un savant du Borno».

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  • François Mitterrand, le vrai père de la Françafrique ?
    2025/09/12

    La Françafrique, une entité opaque qui a manœuvré dans les coulisses pendant longtemps pour donner un sursis à la colonisation. Et dans la galaxie de cette nébuleuse, des mercenaires, des affairistes, et des hommes politiques. Parmi ces théoriciens, un homme au rôle central, mêlé pendant près de 50 ans à toutes les pages sombres de cette histoire : il s'appelle François Mitterrand.

    Avec la participation de Thomas Deltombe, journaliste, éditeur, essayiste, auteur de «L'Afrique d'abord ! Quand François Mitterrand voulait sauver l'Empire français» (éd. La Découverte).

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    Elgas : Certains journalistes ont révélé la jeunesse vichyste du président Mitterrand, tache indélébile à l'honneur qu'il s'efforcera de minimiser pendant son ascension politique. À mesure qu'il avance, l'Afrique sera un continent où il jouera un grand rôle dans l'ombre et dans la lumière, avec une fascination pour la colonisation qu'il voudra maintenir coûte que coûte, moyennant même des réformes dans le style de Jacques Foccart. Partir pour mieux rester. Et il en sera un acteur et un théoricien. Thomas Deltombe, comment est née cette passion, j'allais dire triste passion, de François Mitterrand pour le continent africain ?

    Thomas Deltombe : À mon avis, il y a deux raisons. Il y a une raison idéologique, c'est un nationaliste. Vous avez cité un certain nombre d'enquêteurs qui n'ont pas véritablement révélé son passé nationaliste, mais qui l'ont documenté, disons, très précisément. On pourra y revenir parce qu'en réalité, l'Afrique fait revenir la question de Vichy à un moment très tôt dans sa carrière. Donc il y a ce nationalisme. Il veut défendre la grandeur de la France et il ne le cache pas, il le dit clairement. Et pour défendre la grandeur de la France, il faut selon lui défendre la présence française en Afrique. Donc ça, c'est vraiment un des piliers. Et le second pilier est plus cynique, ou en tout cas plus personnel. C'est simplement qu'il a compris assez tôt, dès la fin des années 40, quel profit il pouvait tirer de son investissement personnel sur les questions africaines dans le jeu complexe de la vie politique de la IVème République. Il avait compris que là, il y avait peut-être une carte à jouer. Et donc les deux ensembles, la grandeur de la France et sa grandeur personnelle se sont conjugués pour qu'il mette l'Afrique au centre de ses préoccupations. D'où le titre du livre L'Afrique d'abord, qui n'est pas de mon fait, mais qui est une expression qu'il utilise lui-même à plusieurs reprises.

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