Il y a des océans dont la pollution est mieux documentée qu’ailleurs. Le Pacifique et son fameux continent de plastique ont bénéficié, ces dernières années, de beaucoup d’études. L’océan Indien, particulièrement le sud-ouest de l’océan Indien, a été jusqu’à présent assez peu observé. Cette année, plusieurs recherches ont été lancées dans la zone grâce au programme ExPLOI. L’une de ces études consiste à produire un inventaire inédit sur la quantité et le type de plastiques que l’on retrouve dans les eaux côtières.
De notre envoyée spéciale de retour de Mahé,
Nous sommes dans le lagon de Baie Lazare, sur l’île de Mahé, à bord du Zodiac, aux côtés des matelots, Chettun Bhonul, doctorant à l’Université de Maurice. Ce matin, comme tant d’autres, il procède à ce que l’on appelle la collecte de microplastiques : « Prêt pour les mettre à l’eau ? ». Le capitaine du Zodiac répond : « Filet manta à l’eau ! »
Ce que le chercheur vient de lancer, ce sont en fait des petits filets harnachés à des flotteurs qui vont capter toutes les particules en suspension, à la surface de l’eau. Durant deux heures, le bateau va tracter ces filets en lignes droites pour collecter un maximum d’échantillons. Une expérience répliquée dans 15 lagons de l’Océan Indien, à Madagascar, à Maurice et bientôt aux Comores.
« L'objectif, c'est déjà pour avoir un aperçu sur le nombre de microplastiques qu'on a sur les lagons, mais aussi en dehors du lagon, pour les quantifier. Du coup, quand je prends les microplastiques, je vais les classifier en taille, en type et aussi en couleur pour savoir quel est le plus commun des microplastiques ? Mon étude est inédite parce qu’on a très peu de données sur la pollution plastique dans le sud-ouest de l’Océan Indien, surtout sur les micro plastiques. Dans le Pacifique, dans les autres océans, on a plus de données sur le plastique, sur la situation. Mais ici, dans cette zone comme Maurice, Seychelles et Madagascar, c’est vraiment novateur. »
De retour au laboratoire, Chettun Bhonul passe les résidus dans trois tamis différents : un de deux millimètres, un autre d'un millimètre et un troisième de 315 micromètres, pour compter les micro-plastiques et les identifier.
Des résultats attendus Pour le comptage des particules les plus fines, le chercheur a besoin du microscope. « Ça, c’est un microplastique. Ça, c’est une fibre, qu’on ne peut pas voir à l’œil nu, mais au microscope, on peut voir. Et ça, c’est un fragment de couleur bleue. On peut voir qu'il y a beaucoup de micro-plastiques qui ne sont pas visibles à l’œil nu. » Le chercheur se met à compter : « Un, deux, trois, neuf… douze. Vous voyez ça, ce sont des fibres. »
« Notre première observation, ça dit que "oui, il y a des microplastiques dans les lagons" et l'objectif de ma thèse est de savoir si le lagon joue un rôle de concentrateur de microplastiques ou au contraire, si les eaux calmes du lagon favorisent la sédimentation, c'est-à-dire la chute des microplastiques vers le fond du lagon. »
Autrement dit, une fois dans la mer, jamais, les micro-plastiques ne disparaissent tout à fait. Les premiers résultats de cette grande étude sont attendus pour septembre 2025.
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